La police espagnole nous attend à la
non frontière franco espagnole. C'est la bienvenue à la maison après 10
jours de voyage. Le retour d'un voyage à la rencontre de la frontière
afro européenne de Ceuta et la mer.
A
Irun, à ce point où nous sommes arrêtés, entourés d'uniformes et de
mitraillettes, il n'existe plus de postes douaniers. Les frontières sont
tombées, nous sommes libres de circuler. C'est pour ça que nous sommes
aller voir l'autre, les autres, celles qui grandissent sans repos.
Nous
donnons nos papiers et attendons à l'extérieur du véhicule. Ils ouvrent
le coffre arrière et nous exigeons notre droit à être présents sur le
côté. L'agent se montre particulièrement intéressé par mon carnet de
voyage, il se met à feuilleter et à entre-lire certains contenus...
“...Nous
attendons le ferry. A côté de notre voiture, il y a un bus entouré de
policiers en civil. Continuellement ils descendent et remontent des
hommes, entre vingt et trente, avec les mains menottées. Ils les
descendent du bus, les amènent à un lieu inconnu puis les ramènent.
L'opération parait très habituelle et le bus semble plein. Les vitres
sont teintées mais on devine les regards. Nous, nous venons de traverser
l'Espagne en voiture, un long voyage de nuit. Nous déjeunons, savourons
les premières heures de notre périple. Voyages parallèles de lignes qui
ne se touchent pas...”
“...Dans
ce bateau, accaparé par les policiers et leurs prisonniers, nous
traversons le port d'Algeciras, au milieu de la baie, nous nous trouvons
face à Gibraltar, territoire Anglais. Nous virons et nous nous
confrontons à l'Afrique, nous sillonnons le détroit, mer profonde, les
vagues nous menacent à faire voltiger les sens, les coordonnées..."
“...Nous
touchons à la fin d'un continent. Ceuta, cage, éprouvette, insulte,
peine. 'Ceuta, ville ouverte' dit un grand panneau à l'entrée du passage
frontière...”
“...Benzu,
la fin de l'Europe – le périmètre. Ici, des ailiers vêtus de vert nous
interrompent, premières heures et salut aux autorités. Il est interdit
de prendre des photos de la barrière, nous disent-ils. Nous sommes
fichés...”
“...Autour des frontières il y a toujours des poubelles, du gasoil et de la fumée...”
“...Est-ce ici, que les bus de ville et les cyclistes font demi-tour. Y a t-il des coureurs de marathon à Ceuta ?...”
"...Couvertures, biscuits, produit de nettoyage traversent la frontière sur le dos des femmes sans visage..."
“...On
la regarde sans douleur et même avec une certaine curiosité, nous qui
pouvons choisir de quel côté observer la barrière. Gibraltar se trouve
là, rejoindre la terre européenne à la nage semble un jeu d'enfant.
Amédo nous sert un thé à la menthe sur sa terrasse qui donne sur la
plage, à 100 mètres de la frontière métallique; 'ça semble près mais tu
ne sais pas comme c'est loin', me dit-il. Pendant ce temps un militaire
marocain nous observe, mitraillette à la main et bottes enfouies dans le
sable..."
L'agent
de police relève ses yeux et croise les miens accusatoires, insultés et
fâchés. “Savez-vous monsieur, que je ne suis pas de mauvaise foi” et il
me rend le carnet. “Vous pouvez continuer”. Nous continuons notre
traversée routinière, ici, où il n'y a plus de trace des drapeaux dans
le ciel, nous nous rappelons à peine qu'à cet endroit il y avait des
guérites installées. L'espace de Schengen. Nous allumons la radio, ils
parlent d'une possible réinstallation des anciennes frontières du vieux
continent.
Je
voudrais que ces murs nous unissent,qu'ils soient notre peau qui se
frôle et se reconnait en cet être humain décoloré de drapeaux enterrés.
Ander